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Pour la première fois cette année, l’UCO était représentée par plusieurs de ses membres au festival Braka Manaki  (Manaki Brothers) à Bitola, en Macédoine. Une semaine de projections, de masterclasses, d’événements divers et de retrouvailles avec nos consœurs et confrères d’un peu partout, toutes et tous animé·e·s par l’amour des images en mouvement.

Retour sur cet événement à travers le regard de quelques membres présents cette année.

Après plusieurs semaines de tournage au Monténégro cette année, la perspective de venir à nouveau dans les Balkans et découvrir un pays que je ne connaissais pas me semblait toute naturelle. Habitué des festivals, je trouve toujours intéressant de voir de quoi est faite une sélection et s’ouvrir à des œuvres qui ne connaitront peut-être pas de distribution en salle ou sur petits écrans. Et j’entends parler du festival Manaki Brothers depuis quelques années!
J’ai pu y découvrir plusieurs films sensibles, dont deux coproductions internationales, films forts et fragiles à la fois.

The Ground Beneath Our Feet,  d’Yrsa Roca Fannberg, filmé par Wojciech Staroń, partage avec le spectateur la chronique d’une maison de retraite de Reykjavik. À hauteur de corps dont les mouvements se font à l’économie et au rythme de l’âge, la caméra de Staroń accompagne une intimité des derniers instants, avec respect et attention. C’est beau, c’est touchant, c’est émouvant, car tout le monde sait que la fin n’est pas loin, et qu’on est privilégié d’être invité là.

When the phone rang, réalisé par Iva Radivojević, filmé par Martin DiCicco, suit les pérégrinations quotidiennes de Lana au moment où le pays dans lequel elle grandit devient l’ex-Yougoslavie. Le coup de fil reçu pour annoncer le décès de sa grand-mère, concomitant de l’annonce du début de la guerre, devient l’épicentre de cet essai fictionnel, porté par le regard de l’adolescente. Un souvenir qu’on n’a pas vécu mais dans lequel on se projette aisément grâce à la photographie de Martin DiCicco, qui sans emphase inutile accompagne une narration entre réel et imaginaire.

Je ne suis pas un fétichiste du médium, mais dans ces deux films, le choix du 16mm m’a semblé faire sens, pour rendre tangible la matérialité des peaux usées par la vie dans un cas, pour évoquer une période historique et l’évanescence du souvenir dans l’autre.

Thomas Lallier


Manaki Brothers est un festival réellement unique en son genre. En arrivant à Bitola, petite ville macédonienne plutôt dans son jus, nous découvrons assez vite l’ambiance sur place.

Après quelques péripéties pour tenter de récupérer nos accréditations, nous trouvons un programme léger, avec les après-midis presqu’entièrement libres, et le reste de la journée des rencontres et des films qui tentent de commencer plus ou moins à l’heure.

Le festival est très calme: ici, pas de réservations en avance, les salles ont toujours de la place pour accueillir le public même à la dernière minute, pas de projections dans tous les sens pour lesquelles nous ne réussissons pas à avoir de place, nécessitant de courir partout pour espérer avoir le privilège de potentiellement y assister. Mais une simplicité à l’échelle humaine absolument rafraichissante.

L’éternel stress parisien quitte alors très vite nos corps pour se mettre au rythme de la vie macédonienne, où l’on prend réellement le temps de discuter longuement et de tisser des liens avec les personnes sur place. On prend aussi un moment pour se retrouver et discuter des films à la sortie de la salle, ce qui donne le temps de laisser infuser les films.

Ce festival aux airs de vacances allie le meilleur des deux mondes, où nous découvrons un bon nombre de films de la région tout en prenant le temps de visiter la ville et ses charmants alentours. Dans un monde professionnel où l’on nous demande d’aller toujours plus vite, plus efficacement, avec souvent toujours moins de moyens techniques et humains, cette petite parenthèse nous fait prendre du recul sur la non-nécessité absolue d’être constamment à se donner à 200%. Comme on le dit souvent, on ne sauve pas des vies et Manaki Brothers nous le rappelle très justement.

Elie Elfassi


Quand on quitte Bitola et le Manaki Brothers, le premier sentiment qui nous traverse c’est qu’on y reviendra. Passé le chaos du début – il faut dire que la direction a changé cette année – la deuxième moitié de la semaine nous a livré quelques beaux moments de cinéma et d’humanité.

Avec une sélection de courts et de longs métrages, de documentaires, des panels et des masterclasses, le festival offre un large choix de rendez-vous. Et le choix est facilité par une programmation « allégée » avec chaque fois le choix entre deux séances en même temps, pas plus. À Bitola, au cinéma comme au restaurant, choisir c’est renoncer alors on prend un peu de tout.
Si par moment, la sélection énerve – il suffit d’avoir tourné en 16mm pour être sélectionné alors ? – les quelques claques que m’ont mis certains films m’ont fait oublier le problème. Sirat, Nouvelle Vague, The Ground Beneath Our Feet, DJ Ahmet… pour ne citer que ces films là !
Les habitué·e·s des festivals seront peut-être déçu·e·s car ici assez peu d’avant premières:  la plupart des films sont ici dans leur fin d’exploitation. Heureusement, il reste le cinéma macédonien, étonnamment prolifique, ainsi que le reste du cinema d’Europe de l’Est que l’on est malheureusement peu amené à entrevoir chez nous.

Mais la grande force de ce festival réside finalement dans le temps accordé à ces moments informels, ceux où l’on boit et l’on mange, et que l’organisation de Manaki et de ses partenaires à géré d’une main de maître. Et comme c’est précieux de se retrouver, avec d’autres opérateurs d’autres cultures, avec des fabricants et même avec les membres de l’UCO !
En bref, merci et à l’année prochaine Manaki !

Maxime Sabin


Après une période de semaines chargées de travail, de tournages et du chaos des grandes villes, est enfin arrivé le jour de partir pour la Macédoine du Nord. Après une longue journée entre avions, retards, bus, détours et heures d’attente (à partir de Rome accompagné de Clem, heureusement), nous sommes finalement arrivés de nuit dans une Bitola calme et paisible.

Notre premier contact avec le festival a été de constater que nous n’avions pas nos accréditations. Cela reste aujourd’hui une anecdote amusante, car le problème a été rapidement résolu en nous fournissant un autre type d’accréditation tout aussi valable (et notre tote bag !). Nous avons tout de suite senti qu’il s’agissait d’un festival particulier : la sérénité de Bitola se reflète dans son atmosphère. Familial et international, le festival se vit dès le matin autour d’un « espresso freddo » au café central, accompagné de discussions passionnantes, tandis que les après-midis laissent place aux projections de courts et longs métrages, souvent empreints d’un rythme lent et contemplatif.

Je voudrais mettre en avant le documentaire Say Goodbye et le long métrage El diablo fuma (le titre complet est Le diable fume (et garde les têtes d’allumettes consumées dans la même boîte), avec la direction de la photographie de J. Daniel Zúñiga et Odei Zabaleta respectivement. Tous deux partagent un goût prononcé pour l’esthétique : le premier, très représentatif de l’esprit du festival, se caractérise par de très rares plans, longs, denses et statiques ; le second, au contraire, par des plans chaotiques, mouvants et dynamiques.

Le festival Manaki Brothers s’impose véritablement comme un événement dédié aux directeurs de la photographie : il se distingue par une sélection de films à forte valeur esthétique, tant visuelle que conceptuelle, et crée des espaces et des moments propices aux échanges entre professionnels du secteur.

Nous repartons avec une excellente impression et sommes d’ores et déjà certains de revenir.

Un grand merci à toute l’organisation du Manaki Brothers, à très bientôt !

Jordi F. Orozco